À chaque jour ses petits plaisirs honteux

Gens célèbres ou anonymes, nous avons tous nos PPH.
Qu'elle se situe à l'autre bout du monde ou sur notre palier,
l'actualité en fabrique à la chaîne et enrichit sans cesse notre Bréviaire.


Le making of du livre



« Le vin est un professeur  de goût,
il est le libérateur de l'esprit et l'illuminateur de l'intelligence. »
 

      Pourquoi nous dédions ce livre à Saint Emilion

-       Tu sais quoi ? J’ai redécouvert un texte de Rousseau que je n’avais pas lu depuis le lycée : le « Discours sur l’origine et les fondements de l’inégalité parmi les hommes ». Quel optimiste sur la nature humaine, ce Jean-Jacques !
-        Je me souviens. C’est bien là où il parle de notre « répugnance naturelle à voir périr ou souffrir tout être sensible et principalement nos semblables » ? Ce serait intéressant de le confronter à l’actualité d’aujourd’hui. Voir si tout ça tient encore la route.
-       « L’homme du XXIème siècle est-il bon ? » Blague à part, c’est un sujet. Depuis le temps qu’on a envie de faire un bouquin ensemble...
-       Tu boiras bien une goutte de vin ? Dis-moi comment tu trouves ce petit Saint Emilion.*
-       Alors juste un doigt pour t’accompagner.
La bouteille est débouchée. La robe est belle, le nez intense.
-       Le tout est de trouver le ton. Plein de gens ont écrit là-dessus, il ne faudrait pas être ridicules. Par exemple, Schopenhauer prenait le contrepied : « L'être humain est, au fond, un animal sauvage et effroyable. Nous le connaissons seulement dompté et apprivoisé par ce que nous appelons la civilisation. »
-       T’as raison, il faudrait éviter l’angélisme.
Hé, il est fameux ton Saint Emilion. J’en reprendrais volontiers une goutte.
Bien rond en bouche, avec ses arômes de fruits rouges et noirs… Le niveau descend.
-       En voilà un que les Prussiens n’auront pas ! Qu’est-ce qu’on disait déjà ? Ah oui, éviter le ton lénifiant.
-       C’est essentiel. Y’en a marre de la langue de bois et du politiquement correct. Moi, me cogner des bons sentiments sur 200 pages, je te le dis, c’est pas mon truc.
-       Moi non plus. A propos, t’as vu leur dernière invention : une Journée de la gentillesse !
-       Hé... faut bien se laver de toutes les petites saloperies quotidiennes.
-       Moi, je dis : la gentillesse, d’accord. A condition de ne pas se cacher les réalités. Les failles, les faiblesses qu'on a tous au fond de nous-mêmes…
     Ah, il est fameux. Je parle du vin.
Les verres se vident et se remplissent.
-       Faut bien admettre, par exemple, qu’on adore les rumeurs. Cancaner. Dire du mal des voisins. Mettre un peu de fiel dans la conversation. Cela n’a jamais tué personne et c’est tellement bon !
-       Colette disait - et elle avait raison - que « le vice, c’est le mal qu’on fait sans plaisir. »
-       C’est comme le fait de se réjouir des petites infortunes des autres. Tout le monde connaît ça.
-       T’as pas honte, quand même ?
-       Si, un peu. Mais avoue que c'est un plaisir !
Allez, on ne va pas laisser un fond de bouteille.
Approche ton verre.

-       C’est sûr qu’on a tous ses petits plaisirs honteux. Le mien, quand je suis sur l’autoroute, c’est de voir l’embouteillage dans l’autre sens. "La file des cons", disaient les Frères Jacques. Et toi ?
-       Moi, c’est plus difficile à avouer…
-       Allez ! On est entre nous, vas-y !
-       Hum… C’est de lâcher un petit pet, comme ça, en douce dans le métro.
-       Et si on imaginait une sorte de bréviaire, où l’on parlerait de tout ça ? Ce serait plus drôle que d’arbitrer le match Rousseau-Schopenhauer, non ?
-       Au fond, c’est peut-être ça le sujet.

Fin de la bouteille. Merci Saint Emilion 




* A consommer avec modération. L'abus d'alcool est dangereux pour la santé.